Comment maximiser les chances de reprise d’une société en réorganisation judiciaire ?
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Redresser une société en difficulté n’est pas chose facile. Surtout si le gérant actuel n’a plus les ressources nécessaires pour compenser les pertes. Dans le cas où il souhaite éviter la faillite de sa société mais que ses tentatives de redressement en interne ont échoué, il déclenchera une procédure de réorganisation judiciaire par voie de transfert. Le ciblage et la qualification des candidats repreneurs sont les étapes de la transaction les plus à même d’influencer la reprise effective de l’activité. Les enjeux d’une procédure de réorganisation judiciaire sont multiples. Chacune des parties prenantes a des intérêts contradictoires. Néanmoins, la réussite des négociations et les chances de trouver repreneur dépendent surtout de la capacité à trouver un terrain d’entente entre les parties, en remplissant le cahier des charges. Dans cet article, nous détaillons ces enjeux et la marche à suivre afin de gérer au mieux ces problématiques.
Lorsque l’exploitation est en perte de vitesse et que les actionnaires actuels n’ont plus les ressources nécessaires pour compenser les pertes, nombreux sont les gérants qui se tournent vers la procédure de réorganisation judiciaire (P.R.J) pour donner un sursis à la société et la réorganiser en interne. Lorsque les tentatives en interne échouent, l’entrepreneur se tourne alors vers le transfert de l’entreprise afin de laisser une dernière chance à cette dernière de subsister. Dans ce processus, des mandataires de justice sont mis à contribution pour trouver des repreneurs. L’objet de cet article est de présenter les différentes étapes de la recherche de cibles et les enjeux du processus dans le cas des P.R.J par voie de transfert. Enfin, nous terminerons notre article par quelques conseils pratiques, à destination des mandataires de justice, pour une recherche de cible réussie. Nous adopterons l’hypothèse qu’aucune faute grave n’a été commise par le gérant et donc qu’il reste aux commandes de la société durant toute la période de sursis.
Etape clé dans le domaine de la transmission et du transfert d’entreprise, le ciblage et la qualification de repreneurs potentiels est un processus qui se décompose en trois étapes. Tout d’abord, on commence par établir une liste de critères pertinents qui correspondent au candidat repreneur idéal pour la société à céder. Ensuite, on dresse une liste concise des sociétés qui répondent le mieux aux critères décidés. Lors de ces deux étapes, n’hésitez pas à faire appel aux connaissances du gérant actuel de la société. En effet, il sera le plus à même d’aiguiller un expert sur les forces et faiblesses de sa société, ses besoins et les candidats potentiels à sa reprise. Enfin, on affine les critères et la liste des sociétés au fur-et-à-mesure de la recherche et des négociations. En réalité, cette dernière étape consiste en la qualification (capacité d’acquisition et de restructuration, stratégie, marché…) des sociétés ciblées et la prise de contact avec celles-ci.
Il est important de toujours se rappeler que le but d’un ciblage est de trouver l’entreprise idéale prête à acquérir la société, bien que le cas d’une société en difficulté pose des barrières supplémentaires. L’idée derrière la reprise est que le repreneur puisse passer d’un tableau peu attrayant de la société à quelque chose de satisfaisant. En d’autres termes, redresser la situation d’une entreprise en PRJ signifie épurer les dettes, investir et remanier les opérations afin de renouer avec la croissance. Dans le schéma d’un mandat de vente d’une société en difficulté, le mandataire de justice devra bien prendre en compte cette notion pour établir sa liste de sociétés cibles. De plus, il devra se souvenir que « entreprise en difficulté » rime souvent avec « risque très élevé » aux oreilles d’un investisseur potentiel. Ainsi, sa recherche de cible est une activité délicate qui pourra prendre un certain temps et il devra s’attendre à un grand nombre de refus.
La problématique des mandataires de justice dans ce type de dossier est qu’ils sont soumis à une contrainte de temps dictée par l’état même de la société. En effet, pour chaque jour passé, la société perd de sa valeur et les chances de sa reprise s’amoindrissent. Au terme de la période de sursis, une société non-reprise signifie faillite, donc perte d’emploi pour un plus grand nombre de travailleurs et perte de capital pour les actionnaires qui verront leurs investissements réduits à néant et leurs apports consommés par le remboursement des créances. Tout cela accumulé, le mandataire de justice en charge de la recherche de repreneurs potentiels est lancé dans d’une réelle course contre la montre.
Un autre enjeu majeur qui se posera à l’expert en charge du mandat est l’arbitrage entre l’ensemble des parties concernées par la transaction et l’urgence de la situation. Les actionnaires chercheront à minimiser leurs pertes en demandant un prix de cession basé sur les perspectives positives de l’entreprise ; les investisseurs potentiels, quant à eux, voudront prendre en compte le risque élevé du redressement de la société, en basant le prix de cession sur la situation actuelle de l’entreprise plutôt que sur une projection de ce que la société pourrait être une fois redressée. De leur côté, les salariés – via les syndicats – militeront pour la préservation des emplois, les créditeurs voudront maximiser la partie de créances recouvrées tandis que les investisseurs potentiels penseront
eux aux moyens les plus rapides pour rentabiliser leurs investissements en triant et priorisant les dépenses actuelles et futures. Dans ce tableau, le mandataire de justice devra trouver un juste milieu entre les différents acteurs, sous peine de rendre les négociations compliquées et de terminer prématurément le plan de reprise au vu de la complexité de la discussion. Néanmoins, il faut savoir que lorsque plusieurs offres sont mises sur la table, le juge en charge de l’affaire choisira le plus souvent le plan qui retiendra le plus d’emplois. Ainsi, il est crucial pour le mandataire de valider ce point avec les repreneurs potentiels lorsqu’il effectue leur qualification.
Enfin, parmi les principaux enjeux que peuvent rencontrer les mandataires de justice figure le handicap qu’ils ne sont pas spécialistes du secteur d’activité, ni expert en transmission d’entreprises. Ainsi, il sera difficile pour un mandataire de justice de connaitre et de contacter les entreprises les plus pertinentes ayant la capacité financière nécessaire au sauvetage de la société, de dissocier les entreprises qui sont prêtes à l’achat de celles qui ne le sont pas, et d’évaluer si le plan de reprise maximise les attentes de chacun par rapport au cahier des charges. Dans le paragraphe suivant, nous donnons quelques astuces pratiques pour aider les mandataires de justice dans leur démarche.
Notre conseil :
L’un des premiers conseils que l’on peut donner à un mandataire de justice chargé d’une telle opération est de prendre le temps de connaitre les attenteset demandes de chacune des parties prenantes et d’inclure ces éléments à la liste des critères. Par exemple, il pourra s’appuyer sur l’expertise du gérant actuel, voire même, sur les têtes de départements opérationnels dès lors que l’entreprise à reprendre est technique et que le gérant n’est pas à même de répondre à toutes les questions. En effet, c’est par ce moyen qu’il sera possible d’obtenir une liste d’entreprises cibles plus pertinente et que les chances de trouver un repreneur seront optimales.
Afin de passer d’une simple liste de critères à un, nous conseillons à l’expert d’user de plateformes telles que Belfirst où il pourra faire une recherche de sociétés par code NACE, type de structure et ressources.
Il est primordial d’inclure à la liste de critères, tous ceux visant les caractéristiques intrinsèques de la société tels que la culture de l’entreprise et ses valeurs. Pour vous aider dans votre recherche, sachez qu’un certain nombre d’entreprises communiquent leurs valeurs, leur stratégie et leur vision sur leur site Internet. Enfin, servez-vous des entrevues que vous avez eues avec l’équipe dirigeante de la société pour identifier les valeurs et les autres points importants de la culture de l’entreprise. En effet, présenter des sociétés cibles qui ont la capacité financière mais des modes opératoires et une culture opposée à ceux de l’entreprise qui doit être reprise, vous fera perdre votre temps car les entités n’arriveront pas à se mettre d’accord. En définitive, même si les négociations aboutissent, le risque lié à la reprise sera plus conséquent. De même, il sera important de vérifier que les entreprises ciblées possèdent la capacité financière nécessaire au sauvetage de la société en difficulté et qu’elles ne sont pas elles-mêmes engagées dans de grands changements en interne. Par exemple, évitez de cibler des entreprises qui sont en train d’acquérir une société ou qui en ont acquis une l’année précédente (filtres possibles sur Belfirst) car il est possible que le process d’intégration de la société absorbée soit toujours en marche. Si tel est le cas, l’entreprise ciblée n’aura peut-être ni le temps ni les ressources nécessaires à la reprise de la société pour laquelle vous avez été mandaté.
Pour faciliter les négociations avec les sociétés ciblées, on conseille au mandataire de justice de cibler les entreprises qui bénéficieraient le plus d’effet synergique en reprenant la société. Ainsi, cela permettra de lever les blocages du premier abord en se concentrant sur le futur possible. En matière de projection, il est plus facile de se projeter lorsque l’on comprend et que l’on se sent en accord avec le but, l’image et la démarche d’une entreprise que lorsque l’on s’y sent diamétralement opposé. Lors de l’étape de prise de contact et de présentation de l’entreprise aux cibles, mettez l’accent sur ce qui est possible de faire à l’avenir avec les deux sociétés et sur ce que les deux entreprises ont en commun.
Outre de faire preuve de patience malgré le feu de l’action, le conseil ultime reste de faire appel à des experts en transmission d’entreprises qui ont une expertise du secteur en question. En effet, par leurs connaissances du marché actuel et de la stratégie des sociétés du secteur, ils pourront vous aiguiller au mieux dans votre recherche de sociétés cibles, mais surtout ils sauront vous épauler pour la constitution d’un dossier attrayant de reprise. Ce volet est très important car seuls des acteurs ambitieux, qui croient au projet et à l’entreprise, investiront. Enfin, étant donné leur expérience du terrain, les experts en transmission vous aideront à mieux arbitrer votre temps alloué à la qualification de chaque cible en distinguant rapidement l’inopportunité de l’opportunité.
POINT INFO PRATIQUE :
« Comment les avocats peuvent-ils trouver un cabinet à racheter et comment peuvent-ils trouver des repreneurs potentiels ? »
Une opération de cession ou d’acquisition nécessite du temps et une expertise dans la matière, deux paramètres qui peuvent manquer. En tant que professionnels de la transmission d’entreprise, nous pensons que la première richesse d’une profession libérale est son carnet d’adresses. On cherche souvent loin un cabinet à reprendre alors que peut-être, dans nos contacts, un confrère pense à arrêter ses activités. A l’inverse, si l’on pense céder ses parts, peut-être un confrère cherche-t-il à se lancer. Si vous exercez dans un cabinet de plusieurs associés, demandez-leur, car ils seront peut-être intéressés par la reprise de vos parts ou connaissent peut-être des personnes de confiance qui pourraient l’être. L’avantage de se tourner vers une personne que l’on connait est que cela facilitera le dialogue et les négociations. Pour ceux qui cherchent à reprendre des parts, sachez qu’en rachetant celles de l’un de vos associés, vous limitez les risques de perte de clientèle dus à la peur de l’inconnu.
En revanche, méfiez-vous d’un abus de confiance !
Pour limiter au maximum un quelconque abus de confiance entre confrères, la solution est d’externaliser sa recherche via un cabinet spécialisé en transmission. Cela reste la meilleure décision lorsqu’on veut céder ou reprendre un cabinet. L’avantage ici est que vous n’aurez pas à jongler entre les agendas pour continuer à exercer votre fonction tout en effectuant l’opération. Des cabinets spécialisés dans la transmission de petites entreprises, des plateformes ainsi que des fiduciaires peuvent vous aider à trouver soit des repreneurs de vos parts, soit des parts à acquérir. Enfin, pensez à avertir le Barreau et à consulter leur support en ligne. En effet, le Barreau peut aussi vous aider dans votre recherche en vous fournissant la liste de tous les cabinets d’avocats dans un secteur d’activité et une zone géographique définis.
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